BOBILLIER, MARCEL (2-1) (117 FRANÇAIS)
Sur la piste l'année 1958 marquait le 60 ième anniversaire de la fameuse ruée vers l'or du Klondike.
À Whitehorse, alors capitale du Yukon et à Dawson, l'ancienne capitale, des fêtes rappelaient cet événement historique car la traversée de la chaîne côtière du Pacifique fut à l'époque un épisode remarquable de l'histoire. Des milliers de personnes se ruèrent dans le défilé de la piste Chilkoot en direction des champs aurifères du Klondike.
Pour rappeler le soixantième anniversaire de cette fameuse course à l'or, un groupe d'hommes et de femmes de Whitehorse avaient marché en juillet de cette année-là de Skaqway, sur la côte du Pacifique à Bennette dans l'intérieur, en suivant la voie ferrée qui traverse la chaîne côtière par le col White. Ce voyage d'une quarantaine de milles n'était certes pas difficile et ne réclamait pas une trop grande endurance bien que la voie ferrée monte à 3,000 pieds d'altitude avant d'atteindre le col White où en 1898 et 1899 des milliers d'hommes et de chevaux pénétrèrent dans le pays. Ce col est moins accidenté que le fameux col de la piste lequel était connu bien des années auparavant par les indiens et les premiers mineurs qui ont pénétré dans le Yukon par la côte du Pacifique..
Escortant les chercheurs d'or du temps en route vers Dawson, le père Gendreau o.m.i. premier supérieur des Oblats dans le Yukon et le frère Dumas, o.m.i. avaient alors gravi les flancs abrupts de la piste Chilkoot. Aucun Oblat n'avait depuis soixante ans franchi ce col complètement abandonné depuis parce que trop haut et trop difficile d'accès mais en fait plus direct pour des voyageurs à pieds que l'ancien sentier montant vers le col White.
Dans l'intention de revivre ces pages du passé et de constater ce qui restait du passage des mineurs au delà de la Chilkoot, le père Léo Boyd omi et moi-même , avons voulu refaire ce trajet et revivre l'épopée. Pour ce faire, nous nous rendions en train ce lundi 25 août 1958 depuis Carcross, au Yukon, jusqu'à Stagway en Alaska.
Arrivés à 2h30, le père Cowgill, assistant de l'école Saint Pie X, nous conduisit en automobile de Skagway à Dyen, neuf miles plus loin. C'est de là que, sac au doc, nous partions aussitôt pour remonter la vallée de la rivière Taiya qui prend sa source dans le défilé de la Chilkoot.
1ère journée: sur la sentier de départ:
Le père Boyd transporte la nourriture et son sac de couchage et je porte le mien, une tente légère, les ustensiles de cuisine et mes appareils-photos.
Après avoir grimpé une centaine de pieds, à flanc de coteau, nous trouvons le sentier qui descend de la montagne en direction de cette vallée. Il est impossible de sauter les abords de cette rivière sur les premiers deux milles car ils sont surplombés par des rochers à pic.
La marche est relativement facile. La forêt nous entoure de toutes parts. C'est une forêt épaisse de conifères à travers lesquels les arbustes et les "devil's clubs" plantes à feuilles larges dont les branche sont couvertes d'aiguilles acérées, poussent à profusion. Il est prudent de ne pas toucher ces derniers car leurs épines pénètrent facilement dans la peau et peuvent l'infecter, mais ce sera presque impossible de ne pas le faire dans la jungle qui nous attend plus haut.
En une demi-heure, nous couvrons, grâce à ce sentier pittoresque, la distance que nous aurions pu parcourir en quelques minutes au fond de la vallée si nous avions pu traverser cette large rivière un peu plus haut par un pont qui existait autrefois. Ce sentier nous fait grimper à plusieurs centaines de pieds au-dessus de la rivière. mais, à son extrémité nous sommes de nouveau redescendus à son niveau et nous trouvons une ancienne route de deux à trois milles de longueur qui conduisait autrefois à une vieille scierie.
La marche est aisée sur cette route unie ou nous rencontrons les premières traces des deux hommes qui nous précèdent. On nous a dit, en effet, que deux jours auparavant, deux Américains du Montana, étaient eux aussi partis pour le col de la Chilkoot.
Nous traversons un bras de rivière sur un pont en bois, sous lequel des saumons nagent. Une odeur de putréfaction est répandue dans l'air car des saumons morts couvrent les deux rives. De nombreuses traces d'ours sont visibles sur le chemin de terre et il n'est pas surprenant que l'un d'eux se montre à deux cents pieds devant nous, un petit ours noir qui, à notre vue se faufile bientôt dans les bois voisins.
La route est assez bonne jusqu'à la scierie où d'immenses tas de sciure et de débris et deux vieilles cabines sont les seuls vestiges de cette industrie abandonnée depuis plusieurs années.
A sept heures du soir, nous atteignons l'extrémité de ce chemin où les derniers sapins ont été coupés et nous pénétrons dans la jungle de cette vallée. Nous essayons de suivre de près le cours de la rivière que des montagnes à pic surplombent de chaque côté, où des glaciers semblent suspendus sur les crêtes, de vrais graciers à reflets bleutés qui descendent parfois très bas dans les ravins.
A 7 h 30 le jour commence à baisser et nous décidons de camper. Nous passont du rivage sur une barre de sable où nous dressons notre tente. Le bois est humide et nous avons de la misère à allumer un feu sur lequel je ferai bouillir de l'eau pour le café.
Une heure plus tard, nous nous étendons sous la tente. Nous avons posé des draps de caoutchouc sur le sable humide et nos sacs de couchage par dessus. Cette première nuit passée au fond de la vallée, en face d'un glacer distant seulement de quelques centaines de pieds n'est pas confortable. Le sol est trop rugueux et je ne dors que quelques heures. Mon compagnon semble se reposer.
par Marcel Bobillier, (2-1) Souvenirs du Yukon
du Chilkoot - 60 ans après
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